C’est parti pour une interview autour de son parcours, de son œuvre, et de Tu sais où me trouver ! son livre en lice !
Tu sais où me trouver n’est pas votre seul roman. Comment êtes-vous venue à l’écriture ?
J’ai commencé sur un coup de tête il y a trois ans. J’avais depuis longtemps des histoires dans un coin de mon imaginaire. Je les avais ressassées, pensées, construites. Je n’osais juste pas franchir le cap. Aller au bout de l’écriture d’un roman entier me paraissait inaccessible. Est-ce que j’aurais assez de matière pour tout un roman ? Est-ce qu’il suffisait simplement d’écrire ce que j’avais dans la tête ? Ça devait forcément être laborieux. Fin 2018, je me suis levée un matin en me disant « Aujourd’hui, j’essaie ». Ça a amorcé la pompe. L’histoire s’est étoffée d’elle-même. Plus j’écrivais, plus j’étais inspirée. Je n’ai plus jamais arrêté d’écrire depuis.
Vous êtes diplômée en Histoire contemporaine. Est-ce qu’il y a une continuité entre l’écriture académique qu’on apprend pendant ses études, et l’écriture de romans ?
En quelque sorte. La première m’a appris à être claire dans ce je voulais faire passer, à structurer mes pensées, être à l’aise pour m’exprimer à l’écrit. Une fois qu’on a ces bases, écrire un roman peut effectivement être l’étape suivante. Il faut juste se jeter dans le vide puisqu’il n’y a plus de cadre, plus de sources, là en l’occurrence historiques, qui alimentent le récit. Tout repose sur notre imaginaire. Le roman permet aussi d’être plus libre au niveau du style et de s’émanciper de la rigueur des travaux de recherche.
Quelles sont vos sources d’inspiration, de quel·le·s auteur·e·s vous sentez-vous proche ?
Tout peut m’inspirer, il suffit que quelque chose, même anodin, provoque une idée pour que la boule de neige prenne de l’ampleur. Je n’ai parfois même pas conscience qu’une partie de mon cerveau cogite. L’idée arrive comme ça. En revanche, je ne recherche jamais l’inspiration dans d’autres romans. Quand je suis en période d’écriture, je suis même incapable de lire. J’essaie justement de ne pas me comparer pour trouver ma propre voix. De fait, je ne sens pas forcément proche d’un·e auteur·e en particulier.
Avez-vous des rituels d’écriture ?
Des rituels assez classiques : de la musique avant tout. C’est indispensable. Surtout quand certaines me procurent les émotions exactes que je veux décrire. Ensuite, il me faut du café… et du calme quand c’est possible. Avant de commencer à rédiger quoi que ce soit, je prends toujours du temps pour visualiser entièrement le passage que j’ai en tête.
Parlez-nous de Tu sais où me trouver ! Comment vous est venue l’idée de l’écrire ?
C’est la première idée de roman qui m’est venue à l’esprit, il y a plus d’une dizaine années, au travers d’une scène précise de l’intrigue. Celle de la dispute entre Greg et Else, où chacun se renvoie la responsabilité de tout ce qui leur arrive. Je voulais parler des difficultés d’un couple qui a, pour beaucoup, tout d’idéal sur le papier, avant qu’un grain de sable ne fasse vaciller son équilibre. J’avais envie d’aborder la mise à l’épreuve d’un couple, de l’amour inconditionnel, et comment il se reconstruit après avoir été si malmené. Pourtant, ce n’est pas celle que j’ai choisi d’écrire en premier parce que je savais que je pourrais prendre moins de recul émotionnel qu’avec un roman historique. Je trouvais que les ressorts de l’intrigue étaient trop difficiles pour être un premier roman. Je voulais en écrire un autre pour faire mes armes d’abord, et ça a été Qu’une parenthèse, qui se passe principalement pendant la Seconde Guerre mondiale.
Votre roman se passe en partie aux Etats-Unis. Est-ce un décor fantasmé, ou un endroit que vous connaissez et aimez ?
C’est un décor complétement fantasmé puisque je n’y suis jamais allée. Mais j’ai tout fait pour coller au plus près de la réalité. J’ai fait beaucoup de recherches, y compris concernant le décalage culturel entre Français et Américains. Le lecteur devait avoir l’impression d’être à Chicago. Cette ville s’est tellement imposée dans l’histoire qu’elle m’a inspiré certains passages. Il y a eu une vraie interaction entre le décor et l’intrigue.
Tu sais où me trouver ! a la particularité de ne pas raconter la phase de séduction, mais la vie après le mariage. Les codes n’existent-ils que pour être brisés ?
Je n’aime pas suivre les codes, sinon ce sont eux qui risquent de dicter l’intrigue. Pour moi, c’est avant tout l’histoire qui prime, je vois ensuite où la ranger. Je voulais aussi qu’on apprenne à connaître les personnages en tant que couple avant de les voir se séduire au moment de leur rencontre. Et pourquoi opposer séduction et mariage ? À bien y regarder, la phase de séduction est présente à double titre dans leur histoire. On la voit lors de leur rencontre évidemment. Elle est là également après, quand il leur faut se réapprivoiser parce qu’ils sont devenus des inconnus l’un pour l’autre. Le jeu entre Greg et Else au moment où elle revient à Chicago pourrait être le même que celui d’un couple qui se forme. Sauf qu’ici il se REforme.
Votre roman est aussi un roman sur les non-dits qui s’interposent entre les gens et les séparent. Il aborde des thèmes graves. La romance est-elle un moyen de faire passer des idées plus sombres ?
Je trouve qu’elle enveloppe les sujets les plus durs d’une sorte de douceur. Sans pour autant édulcorer les émotions, elle permet de ne pas affronter les drames trop frontalement. Elle crée une sorte de diversion et apporte de la lumière. Peu importe les sujets douloureux que j’aborde, j’ai besoin que ça reste lumineux. La romance y contribue énormément.
Comment êtes-vous venue à l’auto-édition ? Avez-vous envisagé de passer par l’édition traditionnelle ?
L’auto-édition n’était pas mon premier choix. J’avais en tête l’édition traditionnelle pour mon premier roman. Ça n’a pas abouti. Je m’étais résignée à le garder dans un coin de mon ordinateur jusqu’à ce que quelqu’un me dise que l’auto-édition pourrait me correspondre. Je suis finalement quelqu’un d’indépendant. Comme j’avais travaillé dans l’édition, je n’ai pas eu peur de tout faire. Je me suis lancée. Pour les romans suivants, j’ai pensé directement à l’auto-édition. C’était devenu une évidence.
Vous avez travaillé dans l’édition, vous avez créé Gaëlle Ausserré Editions, vous tenez un blog sur l’écriture, vous avez auto-édité votre roman. Vous illustrez l’idée qu’il y a un continuum entre auto-édition et édition, qui apparaissent de plus en plus complémentaires. Quel point de vue votre double casquette vous donne-t-elle ?
Ces deux modes d’édition se complètent effectivement, ils n’ont ni les mêmes avantages, ni les mêmes inconvénients. Les deux sont perméables désormais, et il y a de plus en plus d’auteur·e·s hybrides. Mon expérience sur l’une comme sur l’autre m’a appris que la difficulté est la même pour l’auto-édition et pour les toutes petites maisons d’édition. Il est difficile d’exister face aux grosses maisons qu’on soit auto-édité ou une toute petite structure.
Comment faites-vous pour être un peu moins inconnue ?
J’essaie d’être présente sur les réseaux sociaux, de donner à mes romans plus de visibilité en faisant des salons par exemple. Ce n’est pas la partie que je préfère en fait. Je n’ai pas réellement de stratégie.
Avez-vous un autre livre en tête, un autre projet d’écriture ?
J’ai encore quelques livres en tête. Certains sont plus aboutis que d’autres. Le quatrième roman est terminé et j’espère le sortir dans les mois qui viennent en auto-édition évidemment. Je commence tout juste l’écriture du cinquième qui sera à nouveau un roman historique.