C’est parti pour une interview autour de son parcours, de son œuvre, et de Oom, son livre en lice !
Vous êtes l’autrice de plusieurs romans en série. Comment êtes-vous venue à l’écriture ?
Je suis née dans une famille de lecteurs, pour qui la culture est importante. Dès que j’ai su lire, on m’a glissé un livre entre les mains, sans que je ne sois jamais rassasiée. Nous avons beaucoup voyagé, vécu dans des pays étrangers, où j’avais souvent un besoin d’évasion pour me déconnecter — ce qui était paradoxal, puisque l’évasion, je l’avais déjà. Très jeune, je ressentais le désir impérieux de vivre mille vies à travers les pages.
Ma révélation pour commencer à écrire moi-même m’est venue après avoir découvert la série Peggy Sue de Serge Brussolo. J’avais entre neuf et dix ans. À ce moment-là, j’ai été si émerveillée par la plume, la capacité de l’auteur à m’embarquer dans son univers, que je me suis dit : « Hé, moi aussi, je peux le faire ! ». Ce qui n’était pas le cas à l’époque, bien sûr… mais la passion est née ce jour-là, lorsque j’ai rassemblé des feuilles à carreaux, et que je me suis mise à écrire, dans l’espoir d’inviter de parfaits étrangers dans mes propres mondes.
Quelles sont vos sources d’inspiration, de quel·le·s auteur·e·s vous sentez-vous proche ?
Je me sens toujours intimidée par le travail de Maxime Chattam, et sa capacité à me prendre la main dans ses romans, m’emmener sur des sentiers que je n’aurais jamais osé parcourir d’ordinaire. La Trilogie du Mal fut une véritable révélation. Depuis, je n’ai eu de cesse de dévorer ses textes, bien que ce soit la série Autre-monde qui l’emporte.
Cependant, si je devais citer un seul auteur, ce serait Brandon Sanderson. Un génie dans le worldbuilding, la création d’intrigues, de plot twists, et les semis de détails qui prennent une importance incroyable deux tomes plus tard. Peu importe le genre de ses textes, c’est à chaque fois une claque magistrale, et une totale remise en question de mon côté, en tant qu’autrice.
Avez-vous des rituels d’écriture ?
J’ai besoin d’ordre, et d’organisation autour de moi pour écrire, et améliorer ma productivité. J’ai la chance de pouvoir travailler dans un bureau dédié, où je suis entourée de mes bibliothèques, mes univers, des éléments qui me rappellent mes inspirations.
Je m’impose un nombre de mots à rédiger au cours de la journée, après différents calculs en fonction de mes deadlines ; même si je n’ai pas envie, j’écris. C’est un véritable métier, il y a des jours avec, et des jours sans – parfois une contrainte, parfois un loisir.
J’aime utiliser la méthode Pomodoro — travailler au maximum de sa concentration durant 25 minutes, faire une pause de 5 minutes, et ainsi de suite. Il m’arrive d’augmenter le timer lorsque je me sens particulièrement inspirée et motivée.
Je travaille avec plan désormais, après avoir appris de mes premières erreurs. J’ai toujours un carnet près de moi, ou une application qui me permet de garder un œil sur l’évolution de mon texte.
Le silence est important ; impossible pour moi d’écrire correctement lorsqu’il y a du mouvement autour ! La musique est rare, sauf pour des scènes d’importance, qui requièrent un soin précis au niveau de leurs ambiances.
Parlez-nous de OOM. Comment vous est venue l’idée de l’écrire ?
Si la culture a toujours été importante au sein de ma famille, le multimédia l’est aussi : je n’ai jamais été véritablement bridée quant au cinéma, la musique ou les jeux vidéo. Ces derniers faisaient partie de nos moments privilégiés le week-end : mes parents, mon frère et moi nous isolions dans une salle de jeux, et nous jouions tous ensemble. Tomb Raider fait partie de mes meilleurs souvenirs, où nous tentions de résoudre les énigmes ensemble, nous échangions la manette pour passer les difficultés.
Je n’ai jamais perdu cet amour du jeu vidéo (ou gaming). Encore aujourd’hui, lorsque j’ai du temps libre, je joue un peu.
J’écris depuis Peggy Sue. Au cours de mon adolescence, je ne rêvais pas de voir mes romans adaptés en films… non, j’espérais les transformer en jeu vidéo ! Le grand plus : en réalité virtuelle. J’avais des rêves plein la tête, mais en attendant, je m’étais promis d’écrire un jour un roman sur les jeux vidéo.
J’ai osé, en 2019.
Une manière pour moi d’allier vocation et passion.
Vous décrivez avec minutie le monde des jeux télévisés. En avez-vous une connaissance personnelle ?
Pas vraiment. Comme tout le monde, j’ai une idée des jeux télévisés, mais je n’ai jamais été plus attirée que cela. La téléréalité notamment est un mystère que j’essaie de résoudre de mon côté, qui me fait réfléchir sur l’attrait qu’elle revêt, les raisons de son existence, et ce qui nourrit à ce point une curiosité que je ne saurais vraiment définir.
La seule téléréalité que j’ai suivie sur une saison au moins est Circle Game, que j’ai trouvé très intéressante d’un point de vue sociologique, et sur l’appréhension des réseaux sociaux dans la vie quotidienne, et nos rapports aux autres.
Dans OOM, j’ai rassemblé les témoignages que l’on m’a partagés, et composé l’idée d’une téléréalité moins intrusive, plus cadrée selon mon point de vue — je ne prends parti ni pour les jeux vidéo ni pour les jeux télévisés. Je laisse au lectorat la liberté de se faire son propre avis sur la question.
Vous situez votre intrigue en 2056. Le e-sport aurait remplacé le sport aux Jeux olympiques. Est-ce que cela vous paraît être une évolution prévisible ?
L’esport ne remplacera pas les Jeux olympiques d’ici 2056… mais en toute franchise, il risque de prendre une véritable ampleur selon moi. Depuis quelques années déjà, des championnats internationaux sont organisés, où les budgets explosent, et les récompenses sont alléchantes. Je ne serai donc pas surprise si, avec notre connexion à la technologie aujourd’hui, le futur réserve une place privilégiée au domaine du jeu vidéo. Une petite pensée pour le film Ready Player One…
La scène d’introduction d’OOM paraît peut-être démesurée, et pourtant, elle est inspirée des cérémonies actuelles, notamment du grand championnat du monde du MoBa League of Legends. Un véritable feu d’artifice pour les rétines, et des efforts technologiques déployés pour rendre le spectacle ahurissant.
Votre roman est un roman d’anticipation, mais c’est aussi un roman à suspense, avec une pointe de romance. Aviez-vous envie d’écrire à la frontière entre plusieurs genres littéraires ?
OOM était censé être un roman d’anticipation-romance. Finalement, j’ai allégé la romance, parce que je sentais qu’elle n’apportait pas grand-chose comparé à ce que j’avais besoin de raconter au cours de l’histoire.
En général, j’écris les histoires que j’aimerais lire : je rassemble les ingrédients qui agissent à tous les coups sur moi. L’action, l’épique, l’aventure, la romance, une pointe d’humour parfois, des sous-intrigues dans l’intrigue, etc. Je suis mes envies, mon inspiration, et les idées qui me font vibrer.
Vous êtes une autrice hybride : OOM est autoédité, alors que votre série Les MacCoy est édité chez Fyctia Editions et Hugo romans. Vous avez l’expérience de deux modes de publication d’un livre : quels sont les avantages et les inconvénients de chaque support ?
Passer par une maison d’édition assure un filet de sécurité dans une certaine mesure. Je n’ai l’expérience que d’une seule, mais c’est l’aspect que je retiens le plus, ainsi que la décharge de plusieurs responsabilités autour de la création du livre : le travail éditorial, les corrections, le maquettage, la création de la couverture, l’imprimeur, la diffusion… Tout va dépendre de la maison d’édition, de son influence dans le milieu et de ses prestataires, mais pour un grand éditeur, le côté diffusion et vitrine est appréciable : présence du livre dans les librairies, les rayonnages des grandes surfaces, sur les différents réseaux en ligne, par exemple.
L’autoédition exige une rigueur fastidieuse : l’auteur doit assumer plusieurs casquettes et, parfois, avancer des fonds pour les prestations afin de se professionnaliser au mieux. Il doit se former chaque jour, consacrer un temps conséquent s’il souhaite accompagner son texte, et lui permettre de grimper de plus en plus haut. Ce n’est pas de tout repos, loin de là. En revanche, et c’est ce que j’apprécie : nous n’avons de comptes à rendre qu’à nous-mêmes.
La croix et la bannière reste la question des finances, mais là encore, tout va dépendre de chez qui on signe ou ce que l’on fait en autoédition pour rentrer dans ses frais, et espérer se dégager un salaire. Dans le meilleur des cas, il est désormais reconnu que l’autoédition est plus rentable, et plus à même de nous permettre de vivre de l’écriture.
L’un comme l’autre connaît plusieurs facteurs qui influenceront forcément l’expérience individuelle.
Il y aurait beaucoup à dire sur la question. Les deux m’ont cependant enseigné l’autodiscipline, ce que j’estime primordial dans ce métier.
Que mettez-vous en place, seule ou avec votre éditeur, pour être un peu moins inconnue ? Outre la multiplication des vitrines, dont vous venez de parler, une maison d’édition a-t-elle accès à des canaux différents des auteurs auto-édités, ou s’agit-il juste de moyens auxquels ces derniers ne pensent pas ?
Je me forme en marketing, et en communication digitale. L’omniprésence des réseaux sociaux, des sites en ligne, n’est effectivement pas un mythe. Si autrefois, les auteurs se « contentaient » d’écrire dans leur chambre, et d’assister à quelques dîners mondains, nos contemporains doivent s’adapter à la technologie actuelle, user des outils nouveaux qui offrent une meilleure visibilité à nos titres. C’est peut-être encore une fois paradoxal, mais à l’ère du numérique, la proximité avec le lectorat est recherchée, et appréciée. On s’intéresse davantage à l’humain derrière le livre, et les écrivains souhaitent instaurer des liens privilégiés avec leur communauté.
Je pense, au contraire, que les auteurs autoédités sont plus en avance que certaines maisons d’édition (je me permets une généralité, même si ce n’est pas forcément pertinent) dans l’aspect communication, publicités, et présence sur les réseaux. Les auteurs indépendants déploient beaucoup d’énergie, d’astuces, pour se faire connaître, et prennent en main des outils parfois à peine effleurés par les maisons d’édition. Pour les maisons d’édition qui détiennent des catalogues très fournis, plusieurs sorties au cours de l’année, il est difficile de se concentrer sur un seul titre, et tout lui offrir.
Est-ce que OOM est destiné à devenir une série, comme Les MacCoy ? Avez-vous un autre livre en tête, un autre projet d’écriture ?
OOM n’est pas une série, ou tout au mieux, et c’est une porte que j’ai laissée ouverte, sera une duologie. En l’état, le roman se suffit à lui-même, et permet aux lecteurs d’aviser ce qu’il souhaite après la conclusion. Je désirais écrire un one-shot, justement pour m’autoriser à souffler — une série, comme les MacCoy, est très exigeante. Je suis désormais prudente.
Ma tête ne cesse jamais de m’imposer de nouvelles idées ! J’ai actuellement une série de quatre tomes de romance fantastique sur le feu (au diable, la prudence… ?), bientôt terminée, un projet d’écriture sous un format inédit, un quatre mains romance fantastique aussi qui mijote dans la marmite en attendant d’être servie, un énorme projet de high-fantasy sur lequel je travaille depuis plusieurs années… En fait, beaucoup de fantastique ou de science-fiction pour l’instant. La fantasy reste mon premier amour.
J’ai des tas de projets livres en tête, et trop peu de temps pour tous les écrire.