Interview : Florence Tholozan

Florence Tholozan est en lice pour le Prix des Auteurs Inconnus, dans la catégorie « littérature blanche ». Sa réaction quand elle a su qu’elle était sélectionnée pour le Prix :
Portrait de l'auteur : Florence Tholozan
Quand j’ai vu que mon roman La Chinoise du tableau était sélectionné pour le Prix des Auteurs Inconnus, j’ai poussé un tel cri de joie, que mon chat, endormi sur le canapé, a fait un bond et s’est sauvé ventre à terre ! Passé l’effet de surprise, j’ai ressenti un immense bonheur devant cette belle reconnaissance. J’en profite pour remercier à nouveau les membres du jury de m’avoir lue et d’avoir sélectionné mon livre pour participer à cette merveilleuse aventure.

C’est parti pour une interview autour de son parcours, de son œuvre, et de La Chinoise du tableau, son livre en lice !

La Chinoise du tableau est votre premier roman. Comment êtes-vous venue à l’écriture ?

J’ai toujours eu l’amour des mots, doublé d’une imagination débordante. Jeune, je dévorais tous les livres qui passaient à portée de main et j’inventais des histoires que je notais sur des carnets. J’en avais, et j’en ai toujours, une collection impressionnante ! Je ne peux pas ressortir d’une papèterie sans un nouvel achat !

On m’a souvent complimentée pour la qualité de mon écriture pendant mes études et cela m’a encouragée à persévérer dans ce domaine. J’écrivais des poésies, des paroles de chansons pour mes amis musiciens, des scénarios de courts métrages au lycée, et je tenais un journal intime. J’entretenais également de nombreuses correspondances scolaires en France et à l’étranger.

L’écrit m’apportait la répartie qui me faisait défaut à l’oral, étant de nature timide et réservée. Je pouvais ainsi maîtriser mes émotions, gérer le rythme des échanges, réfléchir, choisir le mot qui convient, relire, rectifier, et être plus fidèle à ma pensée. J’ai beaucoup de plaisir à manipuler les mots, à jouer avec leurs sonorités. Il m’arrive de composer des haïkus, de temps à autre. L’écriture me permet de créer, de partager, de transmettre. Elle m’offre une liberté infinie. Elle est également source d’évasion et d’introspection. En écrivant, je ressens beaucoup de sérénité, un peu comme pour la méditation que je pratique régulièrement.

Je n’avais jamais écrit de roman avant La Chinoise du tableau. J’éprouvais cependant l’intime conviction que j’en écrirais un plus tard, quand la vie m’en laisserait le temps. Je me suis d’abord investie dans ma carrière, puis j’ai eu mes enfants. Et bien que j’aie toujours continué à dévorer des livres, je n’avais plus une minute à consacrer à l’écriture.

Vous avez fait des études de psychologie. Votre écriture se nourrit-elle de ce que vous avez appris et de ce que vous vivez dans votre métier de professeur des écoles, ou au contraire, écrivez-vous pour vous en évader ?

Effectivement, je suis professeur des écoles et j’ai suivi des études de psychologie clinique qui m’ont beaucoup enrichie. Je n’ai cependant pas choisi de devenir psychologue, préférant mon tourner vers l’enseignement.

Mon écriture ne se nourrit pas de mon métier car elle répond à un besoin d’évasion, à un changement de décor. Cependant, les lecteurs me disent souvent que mes personnages sont décrits avec beaucoup de psychologie. Je n’en ai pas conscience, même en me relisant, car cette discipline fait partie de ma vie, c’est une manière d’être. Et même si mon roman n’est pas autobiographique, il est sorti de moi. Il est donc empreint de diverses réflexions sur la vie, le comportement des gens, leurs côtés lumineux tout comme leurs zones d’ombre.

Quelles sont vos sources d’inspiration, de quel·le·s auteur·e·s vous sentez-vous proche ?

Tout est source d’inspiration pour moi, les éléments du quotidien, mes voyages, mais aussi les personnes, les arts, que ce soit les livres, les films, les chansons… les rêves aussi, et mon imagination débordante.

Mes écrits ne sont que pure fiction. Un certain nombre de détails personnels s’invitent parfois dans le récit. Ils sont cependant anecdotiques. Seuls mes proches peuvent les déceler. Dans La Chinoise du tableau, je fais par exemple allusion à mes grands-parents pendant la guerre. C’était une façon de leur rendre hommage tout en perpétuant la mémoire de l’histoire familiale

C’est après la lecture du roman Le Rideau déchiré de Jody Picoult que je me suis lancée. La narration au présent ainsi que l’avancée de l’intrigue au fur et à mesure des confidences des personnages m’ont séduite.

Les romans de Carlos Ruiz Zafón, Haruki Murakami et Bernard Werber pour ne citer qu’eux, m’ont incitée à entrouvrir mon récit à l’imaginaire. J’aime également les histoires qui m’apprennent des choses, qui me font découvrir d’autres cultures, d’autres façons de penser et de réagir.

Avez-vous des rituels d’écriture ?

J’écris le plus souvent le soir, quand rien ne pourra m’interrompre, ou lorsque je suis seule chez moi dans la journée. C’est très difficile de m’arrêter quand j’écris, voire douloureux. Je ne commence que lorsque je sais que j’ai au moins deux bonnes heures devant moi. Jamais de nuits blanches, car le sommeil finit toujours par l’emporter, mais je me couche tard. J’écris dans le silence, en sirotant du thé, directement sur mon ordinateur. Lorsque je ne suis pas chez moi, j’ai toujours un carnet pour noter les idées qui me viennent, ou bien le bloc note de mon téléphone. Il m’arrive souvent de m’arrêter en chemin, quand je suis en voiture, pour noter une idée avant qu’elle ne s’envole, car si je ne le fais pas, elle ne revient pas, en général ! Je ne compte pas, non plus, le nombre de fois où j’ai dû rallumer la lumière après m’être couchée, afin d’écrire quelque chose qui me trottait dans la tête !

Parlez-nous de La Chinoise du tableau. Comment vous est venue l’idée de l’écrire ?

Un dimanche de pluie, pour me distraire, j’ai voulu écrire une rencontre. C’est tellement beau, une rencontre entre deux êtres, entre deux âmes qui se correspondent particulièrement !

Je me suis ensuite employée à trouver un nom qui convienne aux personnages, une apparence, un caractère, un passé… et j’ai poursuivi leurs aventures, sans penser une seule seconde que je tenais là le début d’un premier roman.

Les personnages ont rapidement pris les rênes et je déroulais leur histoire sans savoir où ils m’emmenaient ! L’histoire s’est imposée d’elle-même. Aux trois quarts du récit, j’ai eu besoin de faire un plan, un dessin du tableau, une frise chronologique. Je me suis dit qu’il fallait oser aller jusqu’au bout et réaliser mon rêve d’écrire un roman. J’ai laissé pauser le texte quelques semaines, puis j’ai imaginé la fin et cela m’a amenée à structurer le récit, à enlever et déplacer des passages. Je me suis ensuite beaucoup documentée. C’est quelque chose que j’adore car j’aime apprendre, tout autant qu’enseigner. J’ai fait des fiches des personnages. À ce moment-là j’ai entamé un réel travail d’écrivain. Lorsque je suis entrée dans ce processus créatif, mon esprit était en ébullition vingt-quatre heures sur vingt-quatre, même la nuit. Et le jour, une partie de mon cerveau était en effervescence et se consacrait au livre, à mon insu.

C’est vrai qu’il y a un arrière-plan culturel très précis, puisque votre roman fait voyager dans l’espace (en Chine) et même dans le temps (il se déroule sur plusieurs époques). S’agit-il d’une civilisation dont vous aviez déjà une connaissance particulière ? Ou est-elle pour vous un support de rêve, sur lequel vous vous documentez pour écrire ?

Dans mon roman, il est question de la rencontre. De la rencontre entre des êtres, mais aussi entre des cultures et des époques différentes.

L’Asie et la Chine en particulier, me fascinent depuis l’enfance. Je ne sais quel a été l’élément déclencheur de cette passion. J’ai suivi des cours de mandarin et de civilisation chinoise à l’université, je me suis essayée à la calligraphie, et je suis partie en Chine dès que j’ai pu.

Je n’avais pas prévu d’écrire une histoire qui se déroulerait en Chine. Mais, a posteriori, il était inévitable que mes personnages s’y rendent aussi ! Je me suis beaucoup documentée car mes souvenirs et mes études ne suffisaient pas. J’ai pris énormément de plaisir à partager cette culture, souvent méconnue, avec mes lecteurs.

Je présente la Chine que j’ai vécue, qui n’est pas celle que l’on voit dans les médias. Je parle du peuple, notamment la minorité ethnique Dong qui vit dans les montagnes escarpées, à près de cinq cents kilomètres de la frontière vietnamienne. J’ai eu la chance de séjourner chez l’habitant et j’en garde un souvenir inoubliable.

Depuis que mon livre est sorti, je suis en contact avec des sinologues et des chinois avec qui j’ai des échanges particulièrement enrichissants.

Votre livre fait également voyager dans des contrées irréelles et il brouille les frontières entre littérature blanche et littérature de l’imaginaire en amenant une petite touche de réalisme magique, voire de fantastique. Pourquoi ce choix, délivre-t-il un message ? Est-ce que pour vous, « le réel ne suffit pas » ?

La Chinoise du tableau est un roman de littérature générale, dite blanche. Il n’est pas classé en littérature de genre, bien qu’il flirte légèrement avec le fantastique en proposant quelques légères entorses à la réalité. Cette histoire est une invitation au voyage, à l’amour, à la vie. Il traite de manière sous-jacente de la mémoire, de la transmission et du rôle de l’art dans cette fonction. Que restera-t-il de nous et de tous ces petits riens qui ont fait notre vie, lorsque nous ne serons plus là ? Quelles traces souhaitons-nous laisser ?

Nous savons tous combien le réel peut s’avérer difficile. La littérature, et les arts dans leur ensemble, nous permettent de nous en évader, de le supporter, ou tout du moins de nous en distraire. Nous en avons un bel exemple dans La vie est belle de Roberto Benigni. L’imagination est une porte de secours qui met notre esprit à l’abri, lorsque l’existence se complique. Puisque nous ne savons pas tout, puisque la vie est un mystère, ne nous fermons pas au fantastique. Il nous propose un monde infini de tous les possibles. J’ai voulu entraîner le lecteur dans cette voie-là. Lui permettre de lâcher la réalité, de se laisser emporter. J’ai eu plaisir à créer un univers rassurant dans lequel se blottir et trouver refuge.

Des lecteurs m’ont dit qu’ils aimeraient tant que cette histoire soit vraie ! Je leur ai répondu qu’elle l’est, pour peu que nous ayons envie d’y croire. Alors, pour répondre à votre question, le réel ne me suffit pas. Il est si étriqué en comparaison avec ce que notre imagination peut créer ! Les croyances commencent là où s’arrête la science et nous ne savons pas grand-chose !

Votre livre fait alterner des points de vue internes. Quel effet cherchez-vous à produire en offrant au lecteur plusieurs voix pour entrer dans l’histoire ?

La polyphonie narrative m’a permis de me mettre plus facilement dans la peau des personnages, un peu comme le ferait un acteur. Un acteur qui jouerait plusieurs rôles. Par ce procédé, j’ai pleinement vécu leurs vies, j’ai pu accéder à leurs pensées, ressentir leurs émotions et je me suis essayée à mettre en valeur les diversités de leurs témoignages, leurs spécificités, leurs différences, leurs ressemblances. Il s’agissait de devenir eux. Le style de mon écriture s’est adapté à leurs origines, leurs cultures, à l’époque dans laquelle ils évoluaient. Cela m’a donné l’impression de travailler la langue afin qu’elle appartienne aux personnages qui se racontent. L’objectif était de donner l’impression que ces derniers étaient réels puisqu’ils étaient à même de prendre en main leur propre histoire. Je me suis parfois trouvée dans l’incapacité de faire parler les personnages de quelque chose qui leur arrivait. On ne peut pas toujours exprimer ce que l’on est en train de vivre car un recul est nécessaire. L’utilisation du présent trouvait alors ses limites. J’ai dû contourner le problème en mettant en place des retours en arrière, une narration de souvenirs plutôt que de moments présents. Dans ces passages-là, l’utilisation des temps du passé m’offrait la possibilité de permettre au personnage de livrer son ressenti après coup.

Toute la difficulté de l’écriture était de parvenir à poser sur le réel, des mots de couleurs, d’odeurs, de saveurs, de formes… tout en faisant un avec chaque personnage, en pensant et en se comportant comme lui, sans trahir sa personnalité.

La Chinoise du tableau est édité chez M+ Éditions. Comment avez-vous rencontré votre éditeur ? Avez-vous envisagé de passer par l’auto-édition ?

Je pensais m’auto-éditer. J’avais même commencé à dessiner la couverture. Je voulais le faire lire à mon entourage. En quête d’une certaine reconnaissance, d’une légitimité à publier cette histoire, j’ai envoyé le manuscrit à des éditeurs. J’ai commencé par les grosses maisons d’édition. J’ai reçu quelques refus avec en retour des fiches de lecture détaillées qui m’ont encouragée à poursuivre ma quête d’un éditeur. On m’a reproché, justement, la petite touche de fantastique qui ne rentrait pas dans les lignes éditoriales. Mon roman a été ensuite sélectionné par les Éditions Charleston lors d’un appel à textes pour concourir au Prix du Livre romantique 2019 et se voir proposer un contrat d’édition. Cinq finalistes ont été sélectionnés par les Éditions Charleston. Un jury de 12 personnes, composé de libraires, d’auteurs, de journalistes, de blogueurs et de membres de la ville de Cabourg, lui ont décerné la troisième place. L’annonce des résultats ayant été médiatisée, j’ai été repérée par Marc Duteil, éditeur chez M+ Éditions, qui m’a proposé un contrat d’édition suite à la soumission de mon manuscrit à son comité de lecture.

Je suis satisfaite de ma maison d’édition. Marc Duteil, mon éditeur, travaille main dans la main avec ses auteurs. Il est très disponible et ne ménage pas ses efforts pour faire connaître les romans de ses collections. Il n’a pas hésité à publier un livre audio de La Chinoise du tableau ainsi qu’une édition au format livre de poche, afin de permettre à mon ouvrage de rencontrer un plus large public. 

Comment faites-vous pour être un peu moins inconnue ?

Je suis présente sur les réseaux sociaux, principalement sur Facebook et Instagram. Je présente mon livre dans des groupes littéraires. Je suis en relation avec des libraires, des services culturels, des associations, des journalistes et des chroniqueurs. Je dédicace mon livre en librairie et dans des salons du livre. Cet aspect de la promotion du livre est nouveau pour moi. Il faut oser aller vers les autres, donner envie aux gens de lire mon livre. J’ai fait de belles rencontres. C’est formateur et humainement très enrichissant.

Vous avez déjà été remarquée dans d’autres prix littéraires et avez même obtenu le prix de Paroles d’auteur(s) de Saint Clément 2020. Qu’est-ce que cela change dans le parcours d’un auteur ?

Mon roman a effectivement été récompensé par le Prix Paroles d’auteur(e)s 2020. Il a obtenu une place de finaliste pour le Prix Régional de Littérature Lions 2021, une 4e place sur dix romans en lice pour le Prix Féminin pluriel Montpellier Méditerranée 2021. Il a été également été retenu pour le Prix de la ville de Saint-Lys 2020 (Toulouse).

Toutes ces reconnaissances me touchent énormément et me confortent dans le choix de poursuivre l’écriture. Contrairement à ma profession d’enseignante, je n’ai reçu aucune formation, pas même un atelier d’écriture. J’ai appris sur le tas, en lisant beaucoup et en glanant des informations sur internet. Alors comment évaluer la qualité de ses propres textes ? C’est impossible. On ne se voit pas. Les retours des premiers lecteurs que je ne connaissais pas m’ont donné une première reconnaissance qui m’a émue aux larmes. J’ai reçu des lettres qui m’ont particulièrement touchée. Ensuite les sélections par des jurys m’ont donné une reconnaissance professionnelle, tout comme celui des comités de lecture de mon éditeur et de Charleston. Mais malgré ces incroyables encouragements je doute encore. Je n’ai jamais été sûre de moi, de toute façon. Le regard de l’autre compte beaucoup pour moi. Je suis très exigeante envers moi-même. Perfectionniste, même.

Votre roman est en cours de traduction dans plusieurs langues. Travaillez-vous avec les traducteurs ? Qu’est-ce que cela change dans la manière d’écrire ?

Une publication en langue allemande, est prévue en 2022 par les Éditions Drachenhaus, ainsi qu’en anglais aux USA par les Éditions Harvard Square. Les traductions sont en cours. J’ai répondu à une demande de clarification quant à la traduction en anglais d’une phrase. C’est passionnant, surtout pour moi qui adore les langues étrangères. Je suis également en relation avec la maison d’édition allemande. Ils m’ont proposé une couverture qui m’a beaucoup plu. La couverture de la version américaine est à l’étude en ce moment-même. Je suis impatiente de la découvrir !

Avez-vous un autre livre en tête, un autre projet d’écriture ?

J’ai commencé l’écriture d’un deuxième roman qui se déroulera en grande partie en Indonésie, cette fois-ci. Il sera question de reconstruction psychologique sur fond de chamanisme, de résilience, d’amour et d’amitié. J’aime voyager, découvrir d’autres peuples, d’autres langues, d’autres cultures… et partager mes découvertes avec les lecteurs !

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