Interview : Louise Le Bars

Louise Le Bars est en lice pour le Prix des Auteurs Inconnus, dans la catégorie « littérature de l’imaginaire ». Elle nous raconte :

Je me suis réjouie d’être enfin devenue une Inconnue !

C’est parti pour une interview autour de son parcours, de son œuvre, et de Vert-de-Lierre, son livre en lice.

Comment êtes-vous venue à l’écriture ?
J’écris depuis que je sais écrire, des petites histoires que je faisais lire à mes proches, notamment à l’école où il arrivait que mes enseignants les lisent à la classe. Je me suis plongée de façon plus assidue dans l’écriture à l’adolescence.

Avez-vous des sources d’inspiration privilégiées, que ce soit en littérature ou dans d’autres formes d’art ?

Toute forme d’art m’inspire : la peinture, la musique, le cinéma et bien sûr la littérature. J’aime écrire avec de la musique dans les oreilles, ça m’inspire souvent des scènes très visuelles. J’aime la littérature romantique, décadente et sombre, les récits mystérieux, haletants et plein d’aventures, comme par exemple Frankenstein ou Le Prométhée moderne, Les Hauts de Hurlevent, Le Portrait de Dorian Gray…. Je lis principalement du gothique et du fantastique, même si j’aime beaucoup les histoires réalistes tant qu’elles s’intéressent à la psychologie et à l’humanité des personnages. J’aime qu’un livre me dérange, me remue ou me fasse réfléchir. Ce qui m’amène à citer régulièrement dans mes influences des noms comme M.G. Lewis, Anne Rice, Théophile Gautier, Neil Gaiman, Joyce Carol Oates, Amélie Nothomb.
Vert-de-Lierre est votre premier roman. Il appartient à la littérature de l’imaginaire, mais vous avez également écrit un livre jeunesse, et publié une nouvelle dans un recueil au nom explicite, « Noir ». Ce n’est pas simple de se lancer dans plusieurs genres : pour vous, sont-ils des moyens d’expression complémentaires, des moyens d’exprimer une imagination débordante qui se posera peut-être un jour dans un genre de prédilection, ou encore correspondent-ils à des goûts de lecture éclectiques ?

Je pense que le fantastique est déjà mon genre de prédilection, parce qu’il permet d’aborder tous les sujets de façon parfois étrange, parfois inquiétante, parfois triste ou poétique et c’est ce qui fait sa beauté. Mais j’aime bien essayer d’autres genres. J’adore la littérature jeunesse, pour la simple et bonne raison que je lisais déjà petite et qu’encore aujourd’hui, de nombreux auteurs qui se sont consacrés à ce public ont laissé leur empreinte en moi, comme Lewis Carroll, Claude Ponti ou Roald Dahl. Le premier livre que j’ai écrit était un livre jeunesse, « La Petite fille qui chatouillait les étoiles », en autoédition. J’aime faire des incursions dans l’enfance, parce que je pense que ça fait profondément partie de moi. Cette part d’enfance nourrit beaucoup mon imaginaire, qui a tendance à s’exprimer de façon spontanée et libre. Je pense que le jeunesse, tout comme le fantastique à sa manière, peut parler aussi de tout avec poésie et simplicité. Les artistes sont des enfants, au fond, parce qu’ils se donnent sans réserve à ce qu’ils imaginent, ils affirment leur vision des choses, qui se veut intuitive et personnelle, au-delà des tabous et de la retenue des adultes.

Pour ce qui est de l’anthologie « Noir », j’avais envie d’essayer le genre de la nouvelle et celui du film noir, que j’aime beaucoup au cinéma, pour me plonger dans un cadre différent de celui que j’aime exploiter, à savoir le genre gothique. Comme l’imaginaire faisait partie des conditions d’écriture de cette anthologie, j’en suis restée tout de même au genre fantastique dans cette nouvelle, où j’ai pu m’amuser à aborder la question de l’image, des faux-semblants et du sexisme dans le cinéma. J’avais envie de m’intéresser au fait que la beauté peut cacher de la laideur, que ce qui semble lisse en apparence peut cacher quelque chose de violent et sordide.

Dans Vert-de-Lierre, le personnage principal est un écrivain qui cherche l’inspiration au travers de Vert-de-Lierre, qui fournit justement le titre de votre propre roman. Est-ce votre double de fiction ?
Sans être un vrai double comme l’est Rose, par exemple, Olivier possède un petit quelque chose de moi, oui. Son côté enfantin, rêveur, son rapport aux souvenirs et à l’écriture, sa sensibilité et son attirance pour le mystère, principalement.
Et vous… avez-vous connu le syndrome de la page blanche ?
Oh que oui ! J’y ai déjà été confrontée et c’est très frustrant ! Dans l’écriture, j’ai des accès de fulgurance et parfois de vide. Lorsque j’écris, c’est souvent d’une traite, je ne peux pas m’arrêter, mais quand il n’y a rien qui vient… ça peut durer un moment. Ça m’est arrivé à une période dans l’écriture de Vert-de-Lierre, que j’ai mis quatre ans à écrire, quand même, et pour la fin d’Asphodel , roman que j’ai commencé à écrire… à seize ans ! La musique m’aide beaucoup à débloquer ces moments de vide.
Vert-de-Lierre met en scène deux personnages de femmes, vivant à deux époques différentes, que tout oppose : l’une du côté de la soumission, l’autre du côté d’une liberté qui la met à l’écart. Avez-vous écrit un roman féministe ?

Oui. Lorsque j’ai commencé à écrire Vert-de-Lierre, j’étais plus concentrée sur l’aspect surnaturel et fantastique de ce personnage de vampire antique et païen, et l’esprit féministe du roman est venu naturellement s’y installer, ce qui n’est pas étonnant. Je suis féministe et ne pouvais pas écrire autrement un personnage de femme que dans sa confrontation dès la naissance à l’adversité et à la pression sociale énorme qu’elle subit, surtout aux époques abordées dans le roman. Je voulais parler de ce contexte dur et violent dans lequel évolue la femme, où la révolte est compliquée et la marginalise forcément. La métaphore du vampire végétal exprime ce rapport torturé au corps féminin, à ce que l’inconscient collectif veut y voir de rassurant ou attirant, en décalage avec ce qu’il peut avoir d’inné, de libre et sauvage : ses pulsions, sa nature, qui n’est pas forcément délicate, douce et soumise au carcan social.

D’où l’opposition des deux personnages que vous mentionnez : Mélisande est un personnage qui subit, qui tente de lutter face aux conventions mais ne peut gagner de par sa condition de jeune fille noble. Mary est un peu son négatif, elle donne de l’espoir : elle fait de la traumatisante rencontre avec le Lierreux une force et fonde son identité en dépit de ce qui aurait pu faire d’elle une victime. Elle parvient à exister et à s’affirmer en dehors de ce rôle qui lui est plus d’une fois dévolu par le regard extérieur. Elle devient inquiétante aux yeux de la société par cette liberté dans ses choix de vie, mais constitue en réalité un symbole positif du féminin : la sorcière.

Vert-de-Lierre est édité chez Noir d’Absinthe. Comment avez-vous rencontré votre éditrice ?
À l’origine, j’avais choisi d’auto-éditer Vert-de-Lierre, décision prise suite à de nombreux envois auprès de maisons d’édition qui, dans le meilleur des cas, n’avaient pas répondu. J’ai découvert un univers très accessible humainement, et cela m’a permis de nouer des contacts avec des chroniqueurs de blogs littéraires privilégiant les livres auto-édités dans l’espoir de les mettre en avant. J’ai dû envoyer plus de 200 mails pour présenter mon livre ! C’est grâce à l’auto-édition que je suis entrée en contact avec une autrice de Noir d’Absinthe, qui s’intéressait à mon roman. Elle m’a convaincue de l’accompagner au salon des Halliennales, et m’a présentée à son éditrice Morgane Stankiewiez. Nous avons passé du temps à discuter puis elle a accepté de lire Vert-de-Lierre avant de très vite me proposer de le publier.
Que mettez-vous en place avec votre éditrice pour être un peu moins inconnue ?

Mon éditrice, Morgane Stankiewiez, et moi comptons en général sur les salons et les réseaux pour avoir l’opportunité de nous faire connaître auprès du public. Nous adorons créer du lien avec les gens et échanger avec eux, les rencontrer. Mais aussi, nous aimons bien tenter des projets qui sortent parfois du cadre de l’écriture. Gillian Brousse, un auteur de la maison d’édition, a lancé sa propre démo de jeu vidéo, ainsi que plusieurs goodies Noir d’Absinthe comme des dessous de verres, des tasses ou des couettes reprenant les couvertures des romans publiés.

Pendant le confinement, nous avons beaucoup communiqué via les réseaux sociaux avec la campagne Ulule pour mon deuxième roman, Asphodel. La campagne a servi à financer une édition prestige et un artbook de ce roman, déjà illustré par les soins de Flokera à la base, et qui contiendront des illustrations supplémentaires de Flokera pour mettre en valeur son travail. Cette campagne de financement participatif était une première pour Noir d’Absinthe et elle s’est révélée un succès. De nombreuses personnes nous ont soutenus dès le début de la campagne, c’était une merveilleuse surprise !

Avec Morgane Stankiewiez, nous avons également commencé à tourner une mini-série humoristique sur le milieu de l’édition, parce que ça ne se voit peut-être pas hors salons… mais nous aimons autant l’humour que l’imaginaire !

C’est vraiment intéressant que vous ayez transformé la période du confinement en quelque chose de positif. Où cette mini-série est-elle disponible ? Et avez-vous un autre livre en tête, un autre projet d’écriture ?

Les deux premiers épisodes de « Coups Bas » sont disponibles depuis quelques mois sur YouTube sur la chaîne de Noir d’Absinthe et nous en avons partagé la sortie sur Facebook et Instagram lors de la campagne Ulule.

Et j’ai plusieurs projets, pour ne rien vous cacher ! Dont trois nouveaux romans fantastiques, et un autre album jeunesse avec mon compagnon illustrateur qui a rejoint tout récemment Noir d’Absinthe, Laurent Cazuguel, qui ne sortira probablement pas avant Halloween 2021.

Pour suivre l’actualité de Louise Le Bars,  rendez-vous sur :

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